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CES Léon Mignon : état des lieux des menaces qui pèsent sur plusieurs sections de formation

10 Avr 2025 | Actualités à la une, Actualités générales

En tant que SNAFAM, nous ne pouvons rester silencieux face à la situation critique que traverse actuellement le CES Léon Mignon de Liège (Belgique), dont l’accès à la formation est complémentaire à celui proposé par notre lycée français Benoit Fourneyron situé à St Etienne (post 3ème pour la Belgique et compétence complémentaire à des diplômes déjà validés au niveau bac minimum pour la France). L’existence des deux établissements est incontournable pour que notre profession voit un nombre suffisant de profils pouvant entrer dans le métier d’armurier. La seule école française ne permettrait pas de répondre aux attentes du marché.

La lettre ouverte ci-dessous, rédigée par Monsieur Pierre Laboulle, Directeur du Centre d’Enseignement secondaire Léon Mignon dresse un état des lieux précis et mesuré des menaces qui pèsent sur plusieurs sections de formation – et notamment sur la filière armurière – suite à des décisions administratives récentes. Les conséquences de cette crise dépassent largement le cadre local : elles touchent à l’avenir de toute une profession en Europe, à la préservation de compétences rares, et à la capacité de nos entreprises à recruter des profils qualifiés.

Nous vous invitons à en prendre connaissance avec attention, et à relayer cette information auprès de vos réseaux.

« Bonjour,

 Suite aux dernières avancées du dossier et un besoin de faire le point de la manière la plus neutre et nuancée possible, je me permets de vous informer des points cruciaux à mettre en avant de le cadre de la recherche de solutions pour nos sections en danger et, par extension, la pérennité de l’école.

Suite au passage du vérificateur aux dossiers scolaires, le retrait de 75 à 80 élèves est acté, la totalité des 50 élèves français en 4° armurerie sont dans le lot. Les conséquences sont claires ainsi que plusieurs inconnues :

  • Aucune confirmation ne peut être donnée quant à la reconnaissance de ces élèves si ils devaient passer en 5° pour l’année prochaine, si ils n’étaient pas comptabilisés l’année prochaine, nous nous retrouverions dans une situation encore plus complexe et dans l’impossibilité de financer les sections;
  • Les élèves français non reconnus qui redoubleraient leur année en 4°, peuvent-il se réinscrire l’année prochaine ? Cela pourrait mettre un cran d’arrêt à la formation de certains élèves qui ne disposeraient plus des opportunités offertes à tous.tes lors de l’inscription.

Les pertes nettes en périodes seront élevées, entre 200 et 300 périodes donc 12 à 15 équivalents temps plein, et vont entraîner la fermeture de sections et de classes. Selon les projections actuelles qui devront être discutées en réunion PO :

  1. Fermeture de la 7° Armurerie métal et disparition de la spécialisation en réparation demandée par le secteur des détaillants en armurerie;
  2. Fermeture de 2 classes de 4° armurerie, 1 de 5° et une de 6°;
  3. Fermeture des secteurs dessinateur en construction, infographie et soudage à terme;
  4. Impossibilité de dédoubler les sections au mois d’octobre et donc obligation de refuser, pour certaines sections dès maintenant, les inscriptions et ainsi entraîner la baisse graduelle du nombre d’élèves et la disparition de l’école;
  5. Impossibilité d’encadrer correctement les élèves passant à l’année supérieure : il est impossible de respecter la réglementation en matière de taille de classe car nous ne pouvons créer le nombre de groupes nécessaires pour encadrer correctement les élèves, soit nous rayons certains élèves des listes sur base de critères inégalitaires soit la formation des élèves sera de qualité moindre de facto.

Le retrait de ces élèves et l’impossibilité d’inscrire de nouveaux élèves étrangers en 4° a des conséquences claires sur la pérennité de l’école et des sections. Suite à nos portes ouvertes du 31 mars et les demandes d’inscriptions déja reçues, voici les chiffres concrets :

  • Armurerie : 28 inscriptions, 7 valides pour la 4°
  • Bijouterie : 12 inscriptions, 4 valides pour la 4° – 8 pour la 5°
  • Gravure : 7 inscriptions, 3 valides pour la 4° – 4 pour la 5°
  • Horlogerie : 2 inscriptions, 0 valides pour la 4° – 2 pour la 5°

Pour rappel, il est impossible de commencer le cursus en armurerie en 5° au vu des compétences manuelles et en machine outils nécessaires pour commencer à travailler sur les mécanismes internes en 5°. Nous ne retrouverons donc avec suffisamment d’élèves pour alimenter une seule classe de 4° armurerie et nous retrouver donc, d’ici deux ans, à une seule classe d’armurerie en 4°-5°-et 6° et ainsi passer d’une moyenne de 20 à 30 diplômés par an à 5 à 10 maximum au vu des statistiques passées.

Les conséquences pour la viabilité de l’école seront très rapides, sans l’apport des périodes fournies par les armuriers qui ont toujours été le moteur de l’établissement, les autres implantations risquent de péricliter de manière mécanique. L’architecture complexe du centre et ses exigences en encadrement et périodes ne pourra fonctionner à très court terme. Les perspectives à 2 à 5 ans sont catastrophiques, les autres implantations ne pouvant éponger les pertes énormes que la réforme implique.

Le soutien des secteurs économique et culturel à notre démarche n’a, à cette heure, pas porté de fruits concrets malgré des retours parfois encourageants. Je tiens à insister que, en cas de disparition des filières armurière et de gravure, aucune alternative n’existe actuellement au niveau mondial. 

Les réponses et les propositions du cabinet ne sont pas des solutions à l’heure actuelle et à ma connaissance sur base des points suivants :

  • Les sections à ouvrir ne peuvent pas l’être à l’heure actuelle en enseignement pour adultes pour des raisons logistiques, budgétaires et organisationnelles (sans parler du fait que les enseignants actuels ont confié leur volonté de ne pas postuler dans ce type d’enseignement en protestation de la réforme);
  • Les solutions envisagées par le Cabinet d’un enseignement supérieur de type court ne colle pas aux besoins du secteur privé au vu de la hausse des barèmes en lien;
  • Le point de l’agrément d’armurier est toujours limitant;
  • La limitation d’accès aux études est en contradiction avec la politique de mobilité estudiantine européenne;
  • Aucun autre pays ne semble disposé, sur base des contacts pris, à ouvrir des sections similaires.

Il est essentiel que la prise en compte, d’une manière ou d’une autre, des spécificités de l’école et de ses formations soit reconnue et que des solutions pratiques soient proposées et mises en place. Sans l’accueil des étudiants français et étrangers, nos sections ne peuvent subsister. 

Une nouvelle fois, mon objectif est le maintien et le développement de filières uniques et j’en appelle à tous les moyens à votre disposition pour trouver des solutions adaptées dans ce cadre. 

Les équipes sont en pleine démotivation et, même si nous mobilisons l’ensemble des forces vives en lien avec l’école, leur ressenti est que le soutien à l’école de la part de la Ville est limité au vu des enjeux. Un retour vers eux de la part du PO pourrait amender cette image et renforcer les communications déja effectuées en ce sens à mon niveau.

Il est urgent que nous puissions avertir élèves et parents en attente de leur confirmation d’inscription, la perte de crédibilité et d’image que nous subirions si les inscriptions ne pouvaient être honorées serait fatale pour l’école. Notre réputation est internationale mais elle disparaîtra très rapidement avec très peu d’espoir de pouvoir remonter la pente.

Je reste à votre disposition pour toute demande complémentaire,

Veuillez agréer l’assurance de mes sentiments respectueux,

Laboulle Pierre
Directeur du Centre d’Enseignement secondaire Léon Mignon
Rue Léon Mignon 2
4000 Liège